Malossi – Au pays des scoots qui décoiffent!

Actualités Scooters Philippe Borguet
Partager

Malossi Day, un rendez-vous incontournable pour les amateurs de scooters survitaminés. Nous étions sur le circuit d’Adria pour découvrir une autre facette de la course.

Malossi, ce nom ne vous est probablement pas inconnu mais vous ne vous doutez pas qu’il cache un empire. Celui de la préparation racing de scooters. Vous pensez également qu’il s’agit d’une activité artisanale développée au fond d’un petit garage. Peut-être au début, dans les années 30, lorsque le père Armando Malossi réparait motos et cyclos après avoir touché à l’aviation naissante et être passé par les ateliers de Maserati. Aujourd’hui, depuis que son fils Ugo a repris l’affaire familiale en 1958, c’est tout autre. Il suffit de visiter le magnifique bâtiment, tout en rondeur, construit à Calderara di Reno, aux portes de Bologne, voici une dizaine d’années et de découvrir les racks des stocks, hauts d’une bonne dizaine de mètres. Ils s’étendent sur la valeur de deux terrains de foot! Il suffit aussi de consulter le catalogue général pour constater que ce n’est pas uniquement une production de galets de transmission mais que cela touche de multiples pièces spéciales, que ce soit pour les moteurs deux ou quatre temps. Embrayages, ressorts, clapets, pipes d’admission, vilebrequins, cylindres, pistons, échappements, pompes à eau, courroies, arbres à cames, tout y passe. Deux mille pièces différentes sont disponibles pour être envoyées dans 60 pays, Japon, Taiwan et Corée du Sud compris. Un staff d’ingénieurs travaille en permanence pour tirer la quintessence de ces divers éléments, trouver ce qui fera la différence et améliorera la production des principales marques de scooters. Hormis la fonderie proprement dite, tout cela est produit maison et ajusté au centième de millimètre dans une seconde usine située quelques centaines de mètres plus loin. La fusion des deux entités est d’ailleurs prévue prochainement, dès que les autorités auront donné le feu vert.

Malossi Day

Depuis 21 ans, Malossi organise une journée rassemblant sur circuit tous ses tifosi et les diverses coupes promotionnelles que l’usine a créées. Voici quelques années, cette journée se déroulait sur notre circuit de Spa-Francorchamps mais vu les conditions météo souvent incertaines de notre pays, on préfère maintenant le tracé d’Adria, à une centaine de kilomètres de Venise, près des bords de l’Adriatique. C’est là, entre deux séances d’essai d’avant course, que nous avons pu tester quelques scooters dopés par Malossi. Question de se mettre la piste (homologuée F1 s’il vous plaît) en mémoire, on débute avec un classique Honda SH125. Un bruit un peu moins discret qu’à l’origine, une petite hésitation à l’ouverture des gaz mais déjà une plus franche réaction dans les montées en régime. On poursuit avec une Vespa 125 SVie qui n’a plus rien à voir puisqu’elle est kitée en 170cc. C’est déjà autre chose mais la différence n’est quand même pas énorme avec la Honda précédente, le pare-brise y est pour quelque chose. Cependant Nicolas di Lorenzo nous expliquera que le moteur japonais est conçu d’une manière plus appropriée à ce genre de préparation.

Mais, le dessin de la piste et les trajectoires à suivre entrant dans la caboche, passons aux choses plus sérieuses avec un Kymco 400 travaillé au niveau de la transmission et de l’échappement. Les réactions et montées en régime sont directement plus franches, à croire que le moteur n’a pas de limite. Mais on n’a encore rien vu! Voici le Super TMAX. Pour lui la préparation est optimale et touche tous les éléments, y compris les freins et la suspension avec, en prime, une cylindrée portée à 580cc. On parle ici de plus de 10.000€ de pièces spéciales! Mais c’est vraiment autre chose, une vraie bête de course qui tient admirablement le parquet, qui réagit à la moindre sollicitation de la poignée de gaz, qui place l’aiguille du compte-tours d’un seul coup à la limite de la zone rouge et qui l’y maintient constamment suivant l’audace et les capacités du pilote. Pourtant, ce TMAX superboosté reste très convivial et, hormis l’échappement un peu trop libre, peut toujours s’aventurer dans la circulation normale. Seul hic, certaines pièces sont vraiment conçues pour la compétition et donc avec une durée de vie limitée.

Les aléas de la course…

Je sens Nicolas di Lorenzo stressé. Depuis quelques années, le propriétaire du Garage Vincent à Courcelles met ses scooters à disposition du Japonais Tichida Toshimasa et du Taiwanais Mao Hung Chen invités par Malossi et venus spécialement d’Extrême-Orient pour disputer la World Cup. Si le Zip de Mao tourne comme une horloge, le Typhoon de Tichida ratatouille tant et plus. Une longue journée de démontage et remontage, de changements de carburateur, de cylindres, etc., commence pour tenter de trouver l’anicroche. Dix fois Tichida s’habille et dix fois il reste au stand sans accomplir un seul mètre. J’admire son flegme et sa patience. Vedette dans son pays, il connaît les aléas de la mécanique mais venir de si loin pour rater séances d’essais après séances d’essai cela en aurait énervé plus d’un. Car rien n’y fera et après de nombreuses concertations (bien entendu à grands renforts de gestes des mains), il faudra se résoudre à faire appel à cette générosité toute italienne qui plane sur le paddock. Un moteur nettement moins performant en prêt permettra enfin à Tichida de participer à la première course, malheureusement un peu à la traîne du peloton. Au grand dam de cette famille de passionnés, il était écrit que cette année ne serait pas celle du Vincent Racing. En effet, lors de la dernière séance qualif, Mao Hung, qui tournait avec les meilleurs spécialistes italiens du circuit, chute et bascule malencontreusement l’interrupteur de la pompe à eau électrique. La sentence est immédiate: quelques centaines de mètres plus loin, le piston du Zip est fondu. À l’image des épreuves de karting, Malossi a déplacé une oneuse et plusieurs concurrents, dont Nicolas, en profite pour rectifier des cylindres ayant subi ce genre de mauvaises aventures. Pas de chance, lors du tour de chauffe de la manche du samedi, le gicleur principal se bouche. Sans doute une saleté ramassée lors de la chute! Nouveau serrage. Heureusement, il reste la finale de dimanche. N’ayant pu affiner les réglages, nos deux orientaux se retrouveront dans le gros du peloton sans pouvoir se mêler à la lutte pour la victoire. Ce sera pour l’an prochain…

 


Des formules de promotion…

Malossi a développé diverses formules de promotion, tantôt réservées aux scooters automatiques proches de l’origine, tantôt aux mêmes mais kités au maximum, une coupe TNSV, une autre pour les TMAX. L’épreuve mondiale se dispute lors de ce seul Malossi Day mélangeant 2-temps (80cc) ou 4-temps (140cc). Dans tous les cas, un règlement impose des contraintes précises avec un poids minimum (140kg). Ainsi, dans chaque classe, tous les pilotes se retrouvent sur un pied d’égalité et seuls leur adresse et les réglages choisis font la différence. Cela nous donne des courses en pelotons compacts où l’aspiration joue un grand rôle, ou la moindre erreur, le moindre pied qui dépasse, un simple regard vers l’arrière font perdre les quelques centimètres de la victoire.


Télémétrie et tutti quanti

Ces scooters sont de vraies mécaniques de course dont on étudie la télémétrie avec précision après chaque essai (régime moteur, vitesse de pointe et vitesse moyenne par tour et par partiels, température, etc.). Car en plus du rendement moteur classique, de sa carburation, de la température idéale de refroidissement (55° pour le 2T et 70° pour le 4T que le pilote peut moduler en roulant grâce à une pompe à eau électrique), il faut aussi étudier avec attention la transmission. On joue sur le poids des six galets, mais dans l’ordre d’un demi-gramme, sur la résistance des ressorts, sur le jeu des plateaux excentriques, sur la qualité de la courroie, sur la friction de chaque élément pour permettre au moteur de conserver ses tours. Des moteurs 2-temps qui moulinent à 13.700tr/min, les 4-temps tournants à peine moins vite (+/-10.500tr/min)…

Un reportage de Philippe Borguet publié dans le Moto 80 n°768 de novembre 2014.