KTM 690 Duke, ready to road.

Essais Motos Philippe Borguet
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Tout arrive! Ne voilà-t-il pas que KTM oublie (un peu) ses gènes sportifs pour proposer une routière plus conviviale. Rassurez-vous, la KTM 690 Duke conserve encore beaucoup d’ADN «Ready to Race».

Le beau succès commercial européen de la 125 Duke a fait réfléchir les têtes pensantes de Mattighofen. Pourquoi ne pas appliquer cette formule gagnante à la sœur aînée? Surtout que depuis 2008 et l’apparition d’un nouveau moteur, la 690 n’avait plus évolué. Mais quitte à faire quelque chose, autant le faire bien et complètement. La version 2012 que nous avons testée dans les lacets montagneux de Las Palmas est neuve à 90%. Châssis, moteur, position de conduite, accessoires, tout a été revu et corrigé dans l’optique d’une moto plus agréable pour la route et moins exclusive que les versions précédentes.
 

Double plug

Commençons par le moteur. Ce nouveau monocylindre, dérivé du LC4, se caractérise par la présence de deux bougies qui possèdent chacune leur propre mapping. De quoi permettre une diminution de 10% de la consommation. Ce système module également les vibrations (un combat qui, nous le sentirons, n’est pas complètement gagné) et améliore la réponse au gaz grâce à la commande Drive by Wire. L’embrayage dispose du système de glissement APTC. La commande hydraulique est douce et aussi précise que le passage des six rapports de boîte.

Les ingénieurs ont également travaillé sur la fiabilité de l’ensemble. Avec de nouveaux roulements de bielles et des roulements désormais à aiguilles dans la boîte, ils ont repoussé les entretiens aux 10.000km. Les vidanges d’huile imposeront néanmoins la dépose de la chambre d’expansion de l’échappement placée sous le moteur. Une position qui empêche de bénéficier d’une béquille centrale. C’est à 7.500tr/min que ce moulin développe ses 70ch, sa puissance maximale, tandis que son couple de 70Nm est atteint à 5.500tr/min. Ce mono est donc, actuellement, le plus puissant du marché et conserve ainsi cet aspect sportif qui fait la réputation de l’usine autrichienne. Pour éviter tout incident, un rupteur l’empêche de franchir les 8.600tr/min et un large radiateur convexe assure son refroidissement.

 

Châssis treillis

Encore fallait-il placer ce moulin dans un châssis efficace. Un cadre treillis en chrome molybdène a été dessiné. Atteignant à peine les 8 kilos, sa triangulation est impressionnante. Elle participe non seulement à la maniabilité de l’ensemble mais aussi, avec sa couleur orange pétante, à la beauté esthétique de la moto. Une esthétique moins agressive que celles des modèles précédents mais qui reste malgré tout typique à l’esprit Duke. L’arrière cadre boulonné a été coulé dans l’alu et ses jolies formes lui permettent de se passer de tout habillage. Il comprend un tout petit compartiment de rangement sous la selle passager incluant la batterie, les fusibles, la commande de mapping (voir encadré) et la trousse à outils. Il reste juste de quoi ajouter un bloc disque!

 

Le bras oscillant est également en alu coulé, avec des nervures  apparentes du meilleur effet. Il est relié à l’amortisseur monoshock WP (réglable uniquement en précharge) par le système de biellettes Pro Lever propre à la marque. A l’avant, la fourche WP inversée affiche un diamètre de 43mm mais ne comporte aucun réglage possible. Par contre, elle accueille un étrier Brembo radial pour l’unique disque. Un étrier à quatre pistons qui est commandé par un maître-cylindre classique. Cette combinaison s’avérera nettement suffisante et surtout endurante dans les mille et un virages de nos escapades montagneuses.

 

ABS et confort

En développant son dernier système d’ABS, moitié moins volumineux que les précédents, Bosch a fait des heureux chez les constructeurs. La 690 Duke profite de cette compacité et de l’efficacité du Bosch 9 M agissant indépendamment sur chacune de ses roues. Que les amateurs de glissades façon supermotard se rassurent: on peut le débrancher via le tableau de bord. Sans doute les décideurs autrichiens commencent-ils à vieillir et à se rendre compte que la route demande un certain confort. Plus question d’une selle extradure façon motocross ou enduro. Voici enfin une assisse qui ne ressemble pas à un bout de bois et, qui plus est, se situe à une hauteur convenable. A 835mm du sol, soit 3cm plus bas qu’auparavant.

La selle de la Duke 690 est bien dessinée et bien rembourrée. Du moins celle du pilote, car le passager, qui vu la morphologie de la moto et le plaisir qu’on en retire en conduite solo, aura plutôt une présence occasionnelle, le passager donc devra se contenter du service minimum. Ces mêmes décideurs se sont également rendu compte qu’une routière était faite pour rouler plutôt que d’accomplir des sauts de puces d’une station à essence à l’autre. Le réservoir, bien affiné au niveau des genoux, comporte à présent 14 litres, de quoi accomplir au moins 180km (à vive allure) avant de puiser dans la réserve. Soit un petit 6 litres aux 100km.

 

Good vibration

Une fois en selle, le grand guidon, style enduro, vous tombe bien en main. La position vous donne l’impression d’être assis au-dessus de la roue avant en dominant votre sujet. Le moteur s’ébroue avec le bruit caractéristique aux productions KTM et vous ressentez directement que quelque chose vit sous vos fesses. L’embrayage est doux et la sélection de boîte tout autant. Dès les premiers mètres, vous devinez qu’il vous faudra tricoter du sélecteur car, en dessous de 3.000tr/min, le gros piston (102mm de diamètre) cogne. C’est assez embêtant dans la circulation urbaine ou si vous décidez de rouler à votre aise. Dans n’importe quel rapport, pas question de descendre sous cette limite sans avoir un rappel hoquetant du moteur. Le débutant risque d’être un peu perdu. Par contre, au-delà de cette limite, il pousse fort! Avec un poids de 160kg en ordre de marche, cela nous fait 2,29kg par cheval. Ce mono est ainsi capable d’évoluer à près de 200km/h!

 

Ça balance très fort

Mais les premiers mètres vous font aussi comprendre que vous êtes installé sur un véritable vélo. La 690 Duke se balance dans tous les sens avec facilité et le grand guidon vous permet de la contrôler comme une vulgaire machine d’enduro. Les ronds-points, les pif-paf et les virages serrés deviennent des jeux d’enfant et  l’occasion de relancer la mécanique avec plaisir. Dans les virolos, vous pouvez adopter plusieurs styles de conduite: en sortant le pied façon supermotard, en les gardant collés à la machine ou encore en inclinant la moto entre vos jambes, corps bien droit.

 

Dans les longues courbes, il faut un certain temps d’adaptation. En raison des dimensions de la moto et de son empattement plutôt défini pour les virages serrés, vous n’y trouvez pas les mêmes sensations rassurantes qu’avec une naked classique. Un manque de vrai ressenti. Niveau freinage rien que du positif et pourtant le grand disque fut bien sollicité tout au long de notre escapade. La suspension, elle aussi sollicitée par la succession de freinages et de relances continuels, s’avéra parfaite sur le billard de l’île espagnole. Mais elle risque de manquer d’onctuosité sur nos voiries dégradées. A revoir donc chez nous.

Plus cela tourne, plus cette 690 Duke est amusante et les motards corses ou les adeptes de la Molignée vont se régaler…