BMW F 800 GS Adventure – Aventurette?

Essais Motos Laurent Blairon
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Depuis quelques semaines, la famille GS accueille une nouvelle Adventure mais pas celle que l’on attendait. Grâce à la F 800 GS Adventure, vous pouvez désormais vous offir une «petite» aventure. Sans lendemain ou grand amour à la clé?

On le sait, l’insolent succès de BMW Motorrad repose sur deux lettres: GS. Pas la Grande Sophie, non, la R 1200 GS dont la version 2013 à moteur liquide inonde déjà le marché. Sans être oubliés, les autres modèles s’écoulent dans des proportions moindres, comme dans le cas des petites GS, les F 700 et F 800. Pour doper la carrière de ces dernières mais aussi pour séduire les amateurs de vrais trails, voici désormais la F 800 GS Adventure. Bref, on n’a pas fini de parler de géesse…

Opportuniste

Une petite Adventure, en voilà une bonne idée! En tout cas pour celles et ceux rêvant d’une R 1200 GS Adventure mais que leurs finances ne pertmettent pas. En outre, tous le monde n’aime pas le bicylindre boxer, architecture singulière s’il en est. Il y a aussi les passionnés de vrais trails n’ayant plus grand chose à se mettre sous la dent. La future nouvelle R 1200 GS LC Adventure sera farcie d’électronique que les puristes exècrent. La F 800 Adventure est un vrai trail: grande et fine roue avant de 21’’, débattements de suspensions importants, conception relativement simple (fourche classique, amortisseur arrière aussi) et même une transmission par chaîne, que les adaptes de la réparation en bord de piste préfèrent au cardan. Cela étant, ne nous laissons pas trop aveugler par la force de frappe marketing de BMW. Si cette petite Adventure nous arrive, c’est aussi parce que chacun sait que la future R 1200 GS Adventure liquide va certainement crever le plafond tarifaire, BMW juge donc opportun de proposer une alternative aux clients qui – et on les comprend – ne suivraient plus …

Plus d’épaisseur

De loin, pas facile de distinguer la nouveauté mais quelques détails ne trompent pas. Tout d’abord le plexi de protection, plus droit, haut et enveloppant, un modèle rien que pour elle. Ensuite les protège-mains intègrent la dotation d’origine. Les écopes latérales peintes de la F 800 GS abandonnent leurs design en pointe pour des éléments plus imposants, en plastique noir. Et puis visez les excroissances latérales, juste sous la selle: il s’agit du réservoir qui accuse désormais 24 litres, soit 8 de plus, un bond en autonomie appréciable. Même la nouvelle KTM 1190 Adventure R ne fait pas mieux avec ses 23l. La selle, plus épaisse – et plus confortable – contribue également à l’aspect plus massif de la poupe qui, au passage, profite d’un arrière-cadre renforcé, accroissant de 10 kilos la masse totale autorisée (454 kilos, y a de quoi voir venir). Les tubulures protectrices en acier font leur apparition d’origine, d’une part pour protéger le réservoir en cas de chute, d’autre part pour servir de support aux valises latérales optionnelles. On en relève également juste devant les pieds, pour protéger le carter moteur. En gros, l’Adventure gagne en épaisseur et c’est effectivement mieux ainsi, si – comme nous – vous trouviez la F 800 GS un peu trop commune et timide.

Autonomie spectaculaire

Pour prendre place, bien lever la jambe car la nouvelle selle rehausse l’assise d’un cm, soit 890 au total. Avec les valises latérales, mieux vaut être souple… Heureusement, l’option selle basse permet de gagner 3cm. Au guidon rien ne change, nous sommes en territoire connu. Idem pour le moteur qui est strictement celui de la F 800 GS, même si nous pensions que BMW lui réserverait le surplus de puissance (90ch) dont profite la routière F 800 GT. Bref, on retrouve avec plaisir le twin en ligne BMW, disponible dès le bas du compte-tours et joliment sonore. BMW n’a même pas touché aux rapports de boîte, à 130km/h compteur, l’aiguille du compte-tours indique 5.250tr/min. Dommage, pour cette version voyageuse on aurait aimé une 6e plus longue, un peu comme sur la F 700 GS qui, elle, à cette même vitesse, baisse le rythme à 4.750tr/min. Car ce n’est pas nouveau, ce bicylindre vibre à mesure que l’on prend de la vitesse, vers 6.000tr/min cela devient même dérangeant, impossible de tenir ce rythme très longtemps. Du coup, on se pose naturellement à vitesse légale, où s’apprécie réellement la BMW.

Pour le reste le punch est bien présent, la moto étant capable d’envolées à 180km/h et plus… Certes, elle reste assez loin d’une R 1200 GS à qui elle rend pas moins de 40ch. C’est sans doute mieux ainsi, la haute hiérarchie n’aime pas se faire humilier par les nouveaux venus… Nos relevés de consommation font état de 4,5l/100 km en mode très cool et 5,6 en conduite normale. Soit 5,1l/100km et environ 480 kilomètres d’autonomie théorique! Une autonomie très confortable pour les navetteurs.

Gazelle

Cette grande gazelle calque ses dimensions sur la F 800 GS standard. Rien ne change, ni la dimension des roues ni la géométrie du châssis (empattement, chasse, etc). Du coup, avec son  grand réservoir et ses artifices de baroudeuse, elle revendique plus que jamais son cachet de vrai trail, un genre de plus en plus rare mais toujours séduisant. Son comportement brille par sa facilité, supermaniable, l’allemande excèle dans toutes les situations: la ville, le sinueux campagnard, tout lui va. Notre modèle d’essai était enrichi de la suspension pilotée ESA. A l’instar de la F 800 GS, l’unité centrale propose 3 modes de réactivité de la détente: Confort, Normal ou Sport. La précontrainte (pour la charge embarquée) se règle toujours manuellement via une molette latérale. La nouvelle F 800 GSA se targue aussi d’une exclu mondiale dans le segment des trails moyens : le mode enduro disponible en association avec l’ASC. Grâce à un bouton, l’ASC et l’ABS interviennent plus tard, de quoi autoriser, par exemple, des glisses de «placement». Pour les purs, il est possible de tout déconnecter (ABS, ASC) et de se régaler hors des sentiers battus (pas trop trialisants quand même).

En haussant le rythme, sa fine jante avant peut parfois vous troubler, notamment lors des gros freinages où la fourche plonge copieusement. Bref, le ressenti de cette grande galette de 21’’ doit s’apprivoiser.  Cela dit, la marge de sécurité et d’efficacité reste généreuse, la béhème est à la fois souple et stable, un luxe. Posé sur débattements et le moelleux agréable de la selle, on trouvera difficilement mieux pour absorber les cratères qui pullulent sur nos routes, un avantage certain car il en faut beaucoup pour l’écarter de sa trajectoire. Comme la F 800 GS, l’Adventure dévoile des capacités off road intéressantes (mode Enduro, voir encadré) et pas seulement que de gentils chemins roulants et bien dammés, grâce à son architecture de gazelle: roue de 21’’, repose-pieds larges et crantés, pédale de frein réglable. Bien sûr, il y a du poids mais le terme Adventure n’est pas galvaudé.

Beaucoup entreverront cette nouvelle petite GSA comme leur navette boulot-dodo. Elle s’y plie très volontiers. Le regard dominant, on évolue facile entre les files grâce à sa finesse et son équilibre. A rythme de croisière, certains gabarits regretteront la position un peu avanchie (dans la moto), les jambes nettement plus repliées que sur une R 1200 GS. En outre la bulle, assez efficace dans l’absolu, n’est pas encore parfaite pour les 1m85 et plus. Pas de souci pour le buste mais les turbulences gravitent encore auour de leur casque. L’ABS est de série, de même que les protège-mains et les pare-chutes latéraux (moteur + réservoir). Le tout pour 12.500€. Raisonnable dans l’absolu. Au risque de nous répéter, on pointera la politique d’options de la marque qui fait facilement monter la note à 15.000€ (notre machine d’essai) pour peu que l’on coche les options quasi incontournables, savamment inclues dans divers packs.   

Un vrai trail!

Aventurette ou amour pour la vie? Les amateurs de trails allemands hermétiques à la débauche technologique de la R 1200 GS tomberont certainement sous son charme. Plus largment, les ex-possesseurs d’Africa Twin ou d’anciennes Super Ténéré (des trails bicylindres) aussi. Car il s’agit d’un vrai trail, moins snob que la R 1200 GS malgré ses manies bourgeoises (suspensions électroniques, ordinateurs de bord, options). Ses 85ch suffisent amplement pour s’amuser et correspondent tout à fait au style de l’engin. Son prix de base, très BMW, reste élevé pour un «trail à chaîne» mais ouvre pas mal d’espoir aux motocyclistes n’ayant pas la chance de jouir de crédits illimités. Ses quelques bémols (vibrations à vitesse élevée, hauteur de selle pour les petits, bulle pas encore parfaite) pèsent peu face à la somme de ses qualités.

Un essai signé Laurent Blairon et publié dans le Moto 80 n°752.