Laurent Naveau: l’homme qui murmurait à l’oreille des bisons…

Actualités Laurent Cortvrindt
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Les voix du seigneur sont impénétrables. Et la reconversion d'un pilote qui a roulé au plus haut niveau peut sembler toucher au mystique quand, dans un champ du namurois, asséché par la poussière d'une chaude journée d'été, vous croyez reconnaitre un visage au milieu des bisons. Un mirage? Peut-être pas…

Propos recueillis par Laurent Cortvrindt – Photos Jonathan Godin

 

Merci de nous accueillir chez toi. Comment un natif de Bruxelles arrive-t-il ici, à Orchimont, entre les champs et les forêts?

Mes parents m'ont adopté quand j'étais âgé de quelques semaines. Mon père a longtemps partagé sa vie entre les États-Unis et la Belgique pour des raisons professionnelles. Ensuite, il a réorienté sa carrière dans notre pays. Du lundi au vendredi, nous suivions une scolarité à Bruxelles mais en dehors de l'école, nous avons passé tout notre temps ici, à Orchimont, où mes parents ont construit une maison familiale, fin des années 60. Depuis que je suis tout petit, j'ai évolué dans les fermes de la région. C'était vraiment ma première passion.

Sans vouloir t’offenser, tu n’es pas le pilote moto belge le plus connu du grand public. Tu as pourtant roulé pendant 5 saisons en MotoGP…

Oui, c'est vrai. Mon premier départ en GP date de 1993, en Australie. Et ma carrière dans cette catégorie s'est également achevée «Down Under», en 1997. Après un break, de 2000 à 2002, je roulerai aussi en Championnat du monde d'Endurance, avec Honda. En 2001, nous décrochons le titre mais malgré tout, cela ne reste pas mon meilleur souvenir car, à l'époque, le championnat était un peu tronqué avec des titres en Superbike, en Superstock… Cela rendait les choses très compliquées. Par contre, le team a vraiment bien fonctionné avec une moto peu fiable en début d'année. Et décrocher la couronne Endurance dans ces conditions demeure une belle performance. Je me montre donc satisfait de cet accomplissement. Mais mon titre de vice-champion d'Europe en 250cc, en 1992, représente bien davantage à mes yeux. Si je suis moins connu du grand public, c'est peut-être parce que je n'ai pas pu bénéficier de ce petit brin de chance au bon moment. Et puis, quand les choses passent plusieurs fois à côté de toi, à un moment, tu en as assez. En 1997, je me suis dit que j'avais fait le tour en GP500 et qu'il était temps de passer à autre chose. Pourtant, la notoriété a des effets étranges. Lors de mon premier GP en 1993, quand je reviens à l'hôtel, 260 fax – faut-il rappeler que le mail n'existait pas – m'attendaient dans ma chambre. Des anciens copains d'école primaire, des anciens amis… tout le monde se souvenait de moi! Ça, c'était sympa.

Comment attrapes-tu le virus de la moto?

Très simplement. En 1980, un de mes cousins est ingénieur à la Sonaca. Il prépare une TZ 350 pour ce qu'on appelait à l'époque le «Promosport» et je vais assister à une course, à Gedinne, en sa compagnie. Le spectacle me frappe énormément. J'enchaine sur une course à Mettet, puis à Nivelles et la compétition commence à me passionner. En 1981, je deviens fan des Grands Prix et au GP de Francorchamps, je remarque un pilote, Jean-François Baldé, qui freine comme un forcené sur la roue avant avec une Kawasaki 350. C'est à ce moment précis que je me dis: «Un jour, je veux faire cela». Fait amusant, quand je débarque en GP 500, il se trouve que Jean-François Baldé travaille pour Elf. Et un soir à Jerez, à l'occasion d'un repas partagé, je lui avoue qu'il est la raison de ma présence en compétition. Pourtant, je n'ai pas grandi dans un environnement «moto». Mon père était aérodynamicien et ma mère enseignait la biologie. Le rapport avec les États-Unis se veut sans doute plus évident puisque mon père y a beaucoup travaillé. Concernant la moto, j'ai tout appris en autodidacte. En 1981, je débute la compétition par une saison en karting, même si je n'avais pas les 16 ans requis. Je ne vous expliquerai pas comment, c'était une autre époque! (rires) En 1983, je commence à faire des essais sur une TZ 350 et je prends part à deux courses Yamaha mais sous un autre nom, je m'appelais Denis De Wilde! (rires) C'est en Coupe Yamaha que je gagne ma première course. En 1992 par contre, je reçois le support d'un ingénieur japonais qui avait travaillé avec Takazumi Katayama. Et cet homme va me permettre de passer un énorme palier.

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